Archives pour décembre 2011

23 décembre 2011

C’est comme ça qu’ça s’passe dans l’temps des fêtes !

Classé dans dessins, famille, mon histoire

En tout cas, c’est comme ça qu’ça s’passe dans ma famille, à la fin des années 50, au 296 de la rue Manning, à Verdun.

Laissez-moi vous raconter…

JOYEUX NOEL ANNEES 50 296 MANNING VERDUN

Deux semaines avant Noël, mon père marchande notre sapin chez le vendeur qui, chaque décembre, installe son stand au coin des rues Richard et Verdun. Quand le monsieur — exaspéré — accepte enfin de soustraire 25 cents de la piastre qu’il s’obstinait à demander, mon frère Robert et moi — gênés — agrippons notre arbre et le traînons jusqu’à la maison.

Dans le hangar, mon père coupe la base du tronc bien droit à l’aide de son égoïne avant de le clouer à un bout de planche taillé en rond. Semant des aiguilles partout sur son passage, il transporte notre sapin du hangar à la cuisine, puis tout le long du couloir jusqu’au salon, et là, dans le coin près de la fenêtre, il érige le roi des forêts dans une chaudière qu’il bourre ensuite de charbon.

Petit à petit, les branches se déploient sous l’effet de la chaleur. Complètement dégelées, elles finissent par couvrir un bout du sofa et la moitié de la télévision : c’est mon signal pour décorer.

Je place chaque ornement avec minutie, sans me hâter, afin d’étirer le plaisir et de ne pas accrocher toutes les boules rouges du même côté. Les personnages de la crèche — leurs membres recollés avec du Cutex — sont disposés solennellement au pied de l’arbre sur du papier crêpé imitation roche de grotte. Dès que nos trois bas de laine, à mes frères et moi, sont épinglés aux rideaux de cretonne, j’éteins le plafonnier pour voir scintiller mon chef-d’oeuvre dans la lueur de la lampe torchère.

COURONNE DE NOEL 296 RUE MANNING VERDUN FIN ANNEES 50

Commence alors l’interminable attente.

14 longues journées à errer… à rêvasser…
à gigoter sur mon banc d’école.

14 longues soirées à errer… à rêvasser…
à regarder ma mère fabriquer des beignes,
des gâteaux, des cretons et des tourtières.

Et voici qu’arrive la veille de Noël — yesssss !

Fébriles dans nos pyjamas de flannelette, mes frères et moi assistons au rituel du Flacatoune.

Les bouteilles sont alignées sur la table de la cuisine. Mon père, son crâne chauve suant d’anticipation, vide des portions bien mesurées de Black Velvet, de Beefeater, de Québérac blanc et de Canada Dry dans une grosse cruche en verre surmontée d’un entonnoir. Dans un moment de silence solennel, il ajoute à cette mixture une cuillerée à thé de cassonnade avant de visser le bouchon, de brasser la potion, de déboucher la cruche, et de s’envoyer un premier verre derrière le gorgoton.

Se râclant la gorge avec approbation, il se paye un deuxième verre… un troisième… un quatrième… pour éventuellement — l’oeil vitreux et le teint cramoisi — nous interpréter Les fraises et les framboises sur son harmonica, après quoi nous nous couchons.

COURONNE DE NOEL 296 RUE MANNING VERDUN FIN ANNEES 50

C’est le matin de Noël que nous déballons nos cadeaux.

Je ne trouve jamais mon poney, mais j’ai toujours de belles surprises. Il y a bien sûr des camions Tonka pour mes frères, une boîte de chocolats Lowney’s pour ma mère, et de la lotion Aqua Velva pour mon père.

Dans l’après-midi, on fait du popcorn et on regarde le film Heidi à la télévision.

Shirley Temple… non, mais quelle voix ! Quel talent ! Et quelle émouvante performance lorsque, kidnappée par une vieille femme hideuse qui l’emmène dans une carriole tirée par un cheval endiablé, Shirley, hystérique, crie de sa voix stridente «Grandfather ! Grandfather !» à son grand-père qui court derrière — frisant l’apoplexie — dans un ultime effort pour sauver l’enfant qu’il a tant détesté au début du film.

Les larmes me montent aux yeux.

Mais je me rends vite compte que je suis la seule dans le salon à être émue de la sorte. Mes frères ont préféré retourner jouer dans leur chambre ; mon père ronfle dans son fauteuil, un verre vide dans la main gauche, une cigarette éteinte dans l’autre ; et ma mère, sifflant allègrement, s’active à son poste pour réchauffer patates, dinde et petits pois de la veille.

Ce ne sera pas long qu’on va manger et se coucher.
À ma grande déception, la magie s’est déjà envolée.

Joyeux Noël !

 COURONNE DE NOEL 296 RUE MANNING VERDUN FIN ANNEES 50

Paix & Amour

6 décembre 2011

Un signe de l’au-delà et des bonnes nouvelles de l’au-d’ici

Classé dans famille, rituels

L’au-delà…

Il y a vingt ans, hier, mourait ma mère.

Pour souligner l’anniversaire de son départ, j’ai l’habitude, dès mon réveil, d’allumer un lampion que je place à côté de l’urne contenant ses cendres. Sauf que depuis mon récent déménagement, l’urne est restée chez mon fils, ce qui m’a empêchée d’accomplir ce rituel.

Après le lunch, j’étais assise dans mon sofa à contempler mon minuscule mais ô combien charmant appartement lorsque j’ai réalisé où je pouvais installer la lampe que j’adore tant mais pour laquelle je n’avais toujours pas trouvé de place au sein de ma cabane dans les montagnes.

Bien sûr ! Je la placerais sur ma bibliothèque Billy, achetée chez IKEA — il lui manquait définitivement une touche de lumière.

BIBLIOTHEQUE IKEA BILLY BOOKCASE

Je me suis donc précipitée au fond du placard pour récupérer la lampe en question, pour ensuite m’affairée à lui organiser une niche sur la troisième tablette de ma darling Billy.

Une fois la mission accomplie, je me suis écrasée à nouveau dans mon sofa afin d’admirer la douce lueur verte qui transformait ce coin autrefois si désolant en un coin tellement plus accueillant. Et c’est à ce moment-là que j’ai remarqué, sur la tablette juste au-dessus de la lampe, la photo de ma mère prise en 1987 lorsqu’elle s’était rendue en Belgique visiter mon frère Robert (alias Bobby Baby).

Mom Yvonne Thériault in Belgium 1987 Ma mère Yvonne Thériault en Belgique 1987

Un frisson m’a traversé le corps et aussitôt, j’ai dit tout haut :
Aaaaaaaaah… Maman… Maman… Maman.

Eh bien, dès que j’ai eu fini de prononcer le dernier Maman,
la lampe s’est éteinte.

L’ampoule a choisi cet instant précis pour brûler.

Je savais que c’était un signe.
Maman me disait Allô !

Ce qui fait qu’encore une fois j’ai quitté mon sofa, j’ai enlevé la photo de la tablette pour la mettre sur ma table de travail, et j’ai allumé deux lampions que j’ai placés de chaque côté du cadre.

Ils ont brûlé toute la journée pour ma maman, Yvonne Thériault, native de Paquetville, Nouveau-Brunswick, décédée le 5 décembre 1991.

Ce jour-là, elle avait marché jusqu’au village pour faire ses emplettes. Une marche d’un mille et demi, au grand froid. Ma mère n’avait pas de voiture. Elle n’avait jamais eu de permis de conduire. Ma mère était une grande marcheuse.

Sur le chemin du retour, elle s’était arrêtée chez une amie pour boire un café chaud et jaser de tout et de rien. Ensuite, comme il commençait à faire noir, elle était rentrée à la maison, avait soupé, et s’était retirée au salon pour regarder la télévision.

Le soir, la télévision était le seul divertissement dont disposait ma mère pour passer le temps. Elle se berçait tout en la regardant, toute seule dans sa maison plantée au bord d’une route de gravelle, au milieu d’un rang, à Sainte-Sophie-de-Lévrard.

Comme elle détestait regarder la télévision.

Elle disait souvent, C’est plate à mort !

Et voici que la Mort frappa Yvonne dans sa chaise berçante…
alors qu’elle regardait la télévision.

*  *  *

L’au-d’ici…

Après avoir publié La réalité ne me détruira pas, j’ai décidé de me brancher au 21ième siècle : j’ai maintenant l’internet ainsi que le câble de base. À part les stations de télévision, j’ai le grand bonheur d’avoir une quarantaine de stations musicales. En tapant ce texte, j’écoute Flashback Seventies sur Galaxy… après avoir fait une overdose de Smooth Jazz Christmas.

Mais la bonne nouvelle, c’est que je peux dorénavant publier mes billets et communiquer avec vous directement de mon humble demeure.

Câline de binne que la vie est belle.
La vôtre aussi, j’espère.

J’VOUS AIME !

P.S.: Merci pour vos bons mots et vos encouragements sur Facebook. Et merci d’avoir pris le temps de laisser un commentaire — j’aimerais bien qu’il y ait plus d’action et d’interaction ici même sur mon blogue. Avec internet chez moi, je vais pouvoir répondre à vos messages vite-vite-vite.

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